Améliorer la qualité de l’air et l’efficacité énergétique : une combinaison gagnante en milieu industriel
Dans les bâtiments industriels, une bonne qualité d'air intérieur (QAI) est primordiale pour la santé et la sécurité des travailleurs. Dans ces installations, les taux d'émission de contaminants peuvent être de dix à cent fois supérieurs à ceux des installations non industrielles. Afin d’assurer une qualité d’air adéquate, il est essentiel d’avoir un taux de ventilation d’air neuf suffisant pour réduire, voire éliminer, la présence des contaminants, des produits toxiques émanant des procédés, et d’autres produits néfastes pour la santé. Dans cet article, je vous propose d’examiner différents moyens d’assurer un apport en air neuf efficace.
Quand santé et sécurité riment avec efficacité
Selon le Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail (CCHST), le taux de renouvellement d’air peut être calculé au moyen de la formule suivante :
Au Québec, le Règlement sur la santé et la sécurité au travail stipule des taux minimums de changements d’air frais à l’heure (CAH) pour des établissements spécifiques. En voici quelques exemples (S-2.1, r. 13 - Règlement sur la santé et la sécurité du travail) :
En plus de l’importance accordée à la qualité de l’air, il est important de créer une pression légèrement positive à l'intérieur des bâtiments pour éviter différents problèmes – un élément de conception souvent négligé par les dirigeants d’usine. Lorsque la pression de l'air à l'intérieur d'une usine est inférieure à la pression extérieure, ce déficit engendre un problème d’étouffement des brûleurs qui peut nuire à l’efficacité de tous les appareils de combustion utilisés à l’intérieur de l’enveloppe du bâtiment (y compris les équipements de procédé). Ce problème peut générer des interruptions de production non planifiées, des pertes de production importantes, et des dépenses inutiles.
Les bons équipements font la différence
Pour être conforme aux normes des organismes de réglementation en matière de qualité de l’air intérieur et assurer le bon fonctionnement de la combustion au sein d’un bâtiment industriel, des équipements de ventilation à haut débit sont requis. L’utilisation d’équipements standard dans ce contexte entraîne une consommation énergétique très importante, en particulier pour les installations exigeant un nombre élevé de changements d’air, par exemple les espaces d’usine de très grand volume. Lorsqu’il faut introduire de l’air frais de l’extérieur pour les besoins de ventilation, l’utilisation d’un générateur de ventilation à chauffage direct peut être envisagée comme solution de base pour l’air d’appoint. Comme le montre la figure 1a ci-dessous, l’air de combustion est puisé à même le débit d’air frais de l’extérieur par un brûleur à veine d’air (voir figure 1b) et les produits de combustion se retrouvent directement dans l’air chauffé. C’est pourquoi cet appareil convient mieux à certaines applications commerciales et industrielles qu’aux applications résidentielles ou commerciales.
En plus d’offrir une efficacité d’air très élevée (95 % et plus), ce type d’appareil permet de chauffer facilement de grands volumes d’air pour pallier le problème de pression négative souvent présent dans les usines. Cet équipement étant considéré comme une solution de base, il est suggéré de la combiner avec d’autres appareils de ventilation industriels munis d’un dispositif de récupération d’énergie pour réduire davantage la consommation énergétique globale de chauffage.
Figure 1a : Générateur de ventilation tempérée à chauffage direct
Figure 1b : Exemple de brûleur à veine d’air
Les caractéristiques d’équipements de ventilation efficace
Pour effectuer des changements d’air efficaces et maintenir une pression légèrement positive, il faut évacuer l’air vicié et le remplacer par de l’air neuf. Toutefois, évacuer cet air sans récupérer l’énergie qu’il contient entraîne des pertes énergétiques et monétaires importantes, couplées à une production de GES élevée.
Il convient donc d’opter pour un échangeur d’énergie air-air qui :
- permet un transfert énergétique entre les courants d'air qui optimise la récupération d'énergie;
- permet un transfert partiel d'humidité par différentiel de pression entre les deux courants; et qui
- minimise le transfert d'air, d'autres gaz (p. ex. les polluants), de contaminants biologiques et de particules entre les flux d’air vicié et air neuf.
Exemples de technologies efficaces de ventilation
Il existe plusieurs équipements de ventilation efficaces et chacun possède ses avantages et désavantages. Voir le tableau 2 ci-dessous pour plus d’information sur leurs caractéristiques. Ainsi, penchons-nous plus en détails sur la roue thermique et le système serpentin.
TABLEAU 2
Voici un tableau qui résume les caractéristiques des différentes technologies de récupération de chaleur.
LA ROUE THERMIQUE
L’installation d’une roue thermique peut être une solution de choix pour augmenter l’efficacité énergétique d’un système de ventilation et de changement d’air.
Il s’agit d’un échangeur de chaleur air-air cylindrique (une roue) composé d’un enroulement de tôle d’aluminium en constante rotation; la moitié de la surface de la roue est en contact avec l’air évacué et l’autre moitié avec l’air neuf qui doit être chauffé, comme l’illustre la figure 2a. De plus, une roue thermique peut non seulement assurer le transfert de chaleur, mais aussi le transfert d’humidité au moyen d’un revêtement dessiccant additionnel tel que le gel de silicate.
Cette technologie, qui offre une efficacité de 85 %, peut prendre des proportions dimensionnelles imposantes, puisque le diamètre de la roue peut dépasser 3 m (10 pi); les ingénieurs et entrepreneurs doivent donc veiller à ce que la structure de toit soit en mesure de supporter ce poids supplémentaire. Ce type d’équipement peut être utilisé pour des besoins de ventilation à très haut débit – il est donc idéal pour les environnements industriels de très grand volume. Enfin, il s’agit d’un équipement autonettoyant grâce aux flux d’air alternés générés par chaque rotation de la roue. Les figures 2b et 2c montrent une roue thermique conçue par Navada et fabriquée par Concept Air destinée à une usine du Québec.
Figure 2a : Concept d’une roue thermique.
Figure 2b : Roue interne d’aluminium.
Figure 2c : Exemple intégral de roue thermique incluant le boitier de l’équipement.
LE SERPENTIN OU « RUN AROUND »
Une boucle de récupération d'énergie de type serpentin (« run around ») se compose de bobines à ailettes situées dans les courants d'air neuf et vicié d’un système de ventilation. Les bobines sont liées en boucle fermée par une tuyauterie dans laquelle un fluide caloporteur, souvent une solution glycol antigel, est pompé.
Les boucles de récupération d'énergie de type serpentin sont très polyvalentes et particulièrement adaptées aux applications industrielles, car les boucles d'alimentation et d'évacuation sont complètement séparées, ce qui permet un positionnement optimal des évacuateurs là où il existe une chaleur stratifiée intéressante à exploiter (p. ex. les zones de procédé, les fours, etc.). De plus, il s’agit d’une solution énergétique qui requiert très peu d’entretien, car les seules pièces mobiles sont la pompe et les valves. Cependant, pour assurer le fonctionnement optimal de ce type de système, l'air doit être filtré, la surface du serpentin nettoyée régulièrement, la pompe et la vanne entretenues, et le fluide de transfert renouvelé ou remplacé périodiquement.
Figure 3 : Schéma d’une boucle typique de récupération d'énergie de type serpentin (« run around »).
Il est important de noter que cette technologie de récupération de chaleur peut uniquement récupérer l’énergie sensible, mais non l'humidité entre les courants d'air en raison de la distance entre les flux. Avec des débits d'air égaux et sans condensation, les valeurs d'efficacité typiques d’un système à serpentin vont de 45 à 65 %.
Conclusion
Pour qu’un système de ventilation atteigne un niveau d’efficacité élevé en milieu industriel – particulièrement dans l’industrie lourde –, il est primordial de mettre en œuvre une stratégie de récupération de chaleur. Pour les entreprises québécoises, ce genre de stratégie présente plusieurs avantages, à commencer par une protection contre la volatilité des prix de l’énergie et une réduction concrète des émissions de GES. De plus, les subventions d’Énergir peuvent aider à rendre ces projets plus rentables et attrayants d’un point de vue économique. Si vous souhaitez discuter des solutions les mieux adaptées à vos besoins et des subventions d’Énergir pour vos projets de ventilation, je vous invite à communiquer avec les experts du groupe DATECH.
PROGRAMMES DE SUBVENTION OFFERTS PAR ÉNERGIRÉnergir offre plusieurs subventions pour encourager ses clients à atteindre des niveaux élevés d'efficacité au niveau de la ventilation d'usine. L'implantation de ces systèmes et d'équipements est admissible aux deux volets suivants : les volets diagnostic et l'implantation.
1. Le volet Études vise à aider les entreprises à réaliser des études de faisabilité avec une firme de génie-conseil afin d'évaluer différents scénarios visant à réduire la consommation d'énergie. Elle permet donc d'acquitter une partie du coût d'une étude de faisabilité portant sur des mesures d'efficacité énergétique, étude qui sera effectuée par une firme de génie-conseil accréditée par Énergir. La subvention offerte aux clients grandes entreprises est la suivante : Le montant le plus bas entre :
2. Le volet Implantation facilite le déploiement des mesures d'efficacité énergétique identifiées dans les études de faisabilité. Les deux exemples abordés dans l'article (roue thermique et unité de ventilation à cassette) sont des initiatives admissibles à ces programmes. Le montant maximal annuel de la subvention ne pourra être plus élevé que 1 000 000 $ ou 50 % des dépenses admissibles avant taxes (surcoûts estimés du projet), incluant le coût des appareils, d'installation et l'ingénierie. Dans le cadre de ce volet du programme, la subvention est accordée selon le secteur d'activité, ainsi que la période de récupération de l'investissement calculée par mesure d’efficacité énergétique avant subventions. |
Références
https://www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/version/rc/S-2.1,%20r.%2013?code=sc-nb:3&historique=20161118
2020 ASHRAE Handbook—HVAC Systems and Equipment(SI)
https://www.voirvert.ca/savoir/eco-solutions/energie/la-recuperation-chaleur
Omar El-Rouby
Conseiller principal expertise énergétique
Groupe DATECH – Développement et assistance technique