La thermopompe à gaz naturel : la prochaine (r)évolution en matière de technologie gazière
Depuis plusieurs décennies, les thermopompes sont étroitement associées à l'énergie électrique. Toutefois, l'évolution des technologies gazières et la lutte contre les changements climatiques pourraient permettre aux thermopompes à gaz naturel de prendre une place de plus en plus importante sur le marché des solutions efficaces.
Vers une économie faible en carbone
En 2018, dans la foulée de la publication du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques : plan canadien de lutte contre les changements climatiques, le Canada et les provinces ont présenté une feuille de route qui établit des objectifs ambitieux en matière de rendement énergétique des bâtiments. Ces objectifs visent notamment un rendement de plus de 100 % pour les appareils de chauffage de l'eau et des locaux au Canada d'ici 2035. Pour ce faire, les gouvernements favorisent le développement de thermopompes à gaz naturel à haute efficacité pour les applications commerciales et résidentielles.
Énergie collective
Dans ce contexte, plusieurs parties prenantes, dont les distributeurs de gaz naturel, ont élaboré leur propre feuille de route dans le but d'offrir à leur clientèle une solution efficace et rentable. En collaboration avec les fabricants et les centres de recherche, plusieurs initiatives ont été mises sur pied dans le but de développer une nouvelle génération d’appareils ultraefficaces à gaz naturel. Où en est-on dans ce domaine? Quelles sont les technologies les plus prometteuses? C'est ce que nous vous proposons d'examiner dans les prochains paragraphes.
Thermopompe à compression de vapeur
La plupart des thermopompes électriques font appel au cycle de compression de la vapeur, celui-ci étant généralement basé sur l’utilisation d’un réfrigérant de la famille des hydrofluorocarbures (HFC). Dans les thermopompes à gaz naturel qui reposent sur le même principe, le moteur électrique est remplacé par un moteur à gaz naturel pour actionner le compresseur. Plusieurs manufacturiers commercialisent aujourd'hui des thermopompes à gaz naturel de ce type, dont Sierra de Mestek, Ilios de Tecogen, Yanmar, ou encore M-Trigen. Ces appareils sont principalement destinés au marché commercial et, dans certains cas, les fabricants proposent aussi des modèles à débit de réfrigérant variable.
Thermopompes à absorption
Les thermopompes à gaz naturel à absorption sont probablement les plus connues tant leur cycle de refroidissement est bien maîtrisé. D'abord conçues pour répondre aux besoins des clientèles industrielle, commerciale et institutionnelle, leur développement vise aujourd'hui des appareils de plus petite capacité destinés au marché résidentiel et aux petits espaces commerciaux, offerts à moindre coût. Ces appareils s’installent à l’extérieur et utilisent la plupart du temps un mélange d'ammoniac et d’eau, un réfrigérant qui n'émet pas de GES. La compagnie Stone Mountain Technologies (SMTI) travaille d’ailleurs sur un appareil optimisé à moindre coût, qu'elle pourrait commercialiser à partir de 2022.
Thermopompe à compression thermique
Enfin, on trouve aujourd'hui des thermopompes à gaz naturel à compression thermique, une technologie en développement, bien que des thermopompes de ce type soient déjà commercialisées en France et utilisent le CO2 comme réfrigérant. Aux États-Unis, Thermolift est en phase de précommercialisation d'une thermopompe à compression thermique utilisant l’hélium et a amorcé un projet de démonstration en Colombie-Britannique, auprès de clients résidentiels et commerciaux.
Des performances « quatre saisons »
Contrairement aux thermopompes électriques, qui requièrent un système de chauffage d'appoint pour conserver leur capacité par temps froid, les thermopompes à gaz naturel sont en mesure de maintenir leur capacité même par grand froid, comme le montre la figure 1. La compagnie Thermolift publie des résultats qui montrent une capacité de 100 % sur toute la plage de température et une efficacité stable supérieure à 130 %.
Économies d’énergie et réduction de GES au rendez-vous
Compte tenu de leur niveau de rendement, les thermopompes à gaz naturel à haute efficacité devraient permettre des économies d'énergie de 25 à 45 % par rapport aux appareils à gaz naturel à condensation. Cette évolution technologique représente un jalon important et une avenue prometteuse dans la course à la réduction des GES. De plus, l'utilisation de gaz naturel renouvelable (GNR) pour l'alimentation de ces thermopompes permettrait de bonifier les bénéfices environnementaux offerts par ces appareils.
À ce sujet, voici quelques exemples de produits disponibles ou en cours de développement.
Des solutions complémentaires
En plus de leurs avantages en termes de rendement et de réduction des GES, les thermopompes à gaz naturel n'ont aucun effet sur les pointes de consommation électrique, contrairement aux thermopompes électriques qui, par temps froid, peuvent nécessiter un système d'appoint fonctionnant lui aussi à l'électricité. À l'instar des autres appareils à gaz naturel, la thermopompe à gaz naturel, toutes technologies confondues, constitue donc une solution complémentaire à la gestion des pointes électriques.
De plus, la combinaison de solutions à gaz naturel et électriques permet d'utiliser la bonne énergie au bon endroit, au bon moment, et au meilleur coût et offre une résilience accrue – des atouts de taille dans le contexte de la lutte contre les changements climatiques.
En conclusion
Les thermopompes à gaz naturel allient rendement, efficacité et bénéfices environnementaux, et l’offre commerciale est prometteuse. Énergir s’intéresse de près à cette technologie et collabore à son développement et à sa commercialisation, en collaboration avec d'autres distributeurs gaziers et les fabricants. Elle s’inscrit en droite ligne avec notre volonté de proposer des solutions innovantes à nos clients pour leur permettre de demeurer performants tout en les aidant à réduire leur consommation d’énergie et, par le fait même, leurs émissions de GES.
Gaz naturel et efficacité énergétique : un peu d'histoireL'efficacité énergétique des appareils à gaz naturel comme le générateur d’air chaud et la chaudière à eau chaude s'est améliorée au fil des décennies sous diverses influences : la crise du pétrole dans les années 70, les fluctuations du coût de l’énergie dans les années 2000 et les préoccupations environnementales, omniprésentes aujourd'hui. Actuellement, cette efficacité atteint plus de 90 %. Pour y parvenir, il a fallu développer des matériaux et des agencements différents afin de permettre la récupération de l’énergie latente dans les produits de combustion. Au cours des années 1990, les appareils à condensation (efficacité > 90 %) ont fait leur apparition. D'abord perçus comme marginaux et peu rentables compte tenu de la situation concurrentielle du gaz naturel, ils sont devenus beaucoup plus abordables au début des années 2000 en raison des fluctuations du prix de l'énergie et de la création de programmes d'efficacité énergétique qui en ont facilité l'acquisition. Les changements réglementaires imposent aujourd'hui des rendements minimaux de 92 %, qui passeront bientôt à 95 %. L'augmentation du niveau d’efficacité des appareils à condensation se fait maintenant à coup de point de pourcentage et atteint au maximum 99%, grâce à des améliorations au niveau des contrôles et des échangeurs de chaleur. Afin de pouvoir franchir le prochain niveau, soit 100 % et plus, les améliorations technologiques doivent désormais porter sur de nouveaux principes tels que ceux utilisés pour les thermopompes. |
AutEUR :
Marc Francoeur, ing. CEM, PA LEED Conseiller principal, Intelligence technologique, Commercialisation & intelligence technologique
SourceS :
L’Informa-TECH est une publication du Groupe DATECH d’Énergir, Volume 34, numéro 2, décembre 2020