CE QUE VOUS AVEZ PEUT-ÊTRE MANQUÉ...SOUPER-CONFÉRENCE DU 4 novembre 2019
Le 4 novembre dernier, à l’occasion de la Soirée prestige Énergir, le Chapitre de Montréal a eu l’honneur de recevoir M. Joey Villeneuve qui est venu nous présenter les avancées en culture sous serre. Puis, pour la conférence principale, le Chapitre a accueilli M. Daniel Pearl, Architecte, qui est venu nous parler des principes de l’aménagement urbain durable.
Conférence technique
Les avancées en culture sous serre
Présentée par M. Joey Villeneuve, ing., M.Sc, CMVP, Consultant - Énergie en agriculture, Génika
Gauche à droite : M. Hugo St-Amant en compagnie de M. Joey Villeneuve
M. Villeneuve a commencé son discours en nous présentant un bref historique des serres et des fondateurs de celles-ci pour nous mettre en contexte. Plusieurs points seront traités durant sa présentation comme le marché cible, le chauffage et le climat propice, les lois et règlements, le projet de culture en serre ainsi que les équipements de la serre.
M. Villeneuve a commencé avec le premier point, « L’histoire de la serre » en nous faisant part que ce principe existe depuis l’an 30 à Rome, suivi par les premières serres modernes en verre dans les années 1300 en Italie et par la première serre moderne pratique dans les années 1800 au Pays-Bas.
Mais pour bien comprendre le sujet, M. Villeneuve est revenu au principe d’une serre, le concept de réchauffement de la terre. C’est le même principe que la terre, nous avons besoin dans une serre de la lumière en abondance, une température adéquate à l’année autour de 200C, une injection de CO2 ciblée d’environ 1000 PPM pour la plupart des cultures (moyenne mondiale atteinte de 412 PPM en 2019).
Un autre élément spécifique de la culture en serre est le rendement. Pour la culture de tomates, on parle des rendements variant de 3,6 kg/m2 et jusqu’à 45 kg/m2 selon la culture :
- tomate de champs (3,6 kg/m2) ;
- tomate en tunnel avec éclairage et arrosage contrôlés (7 kg/m2) ;
- tomate de serre individuelle avec éclairage, arrosage et températures contrôlés (± 20 kg/m2) ;
- tomate de serre jumelle polyéthylène double (± 45 kg/m2) ;
- tomate en serre de verre, moderne (80 kg kg/m2).
LE MARCHÉ CIBLE
Mais M. Villeneuve nous sensibilise qu’avant de choisir un modèle, il faut définir le marché cible, savoir dans quel créneau se situe le projet qu’on veut faire et ensuite choisir une culture ou une polyculture en conséquence.
Alors, certaines questions doivent être posées :
1- Évaluer le créneau pour la nouvelle serre :
- Tomates, concombres, poivrons, aubergines, laitue
- Produits niche unique à valeur rajoutée
- Qu’est-ce que le consommateur veut manger ?
- Budget alimentaire disponible ?
- Biologique ou traditionnel ?
- Potées fleuris (vivaces et annuelle)
- Qu’est-ce que le consommateur veut montrer ?
- Cadeau ou utilisation personnelle ?
- Budget loisir disponible ?
- Tourisme
- Biodôme, Piscine, aire de repos, etc.
2 - Trois marchés pour l’agriculture urbaine :
- Soit un marché de remplacement
- Soit un produit unique de niche
- Un produit communautaire/ éducatif.
3 - Vente au détail/marché communautaire :
- Kiosque à la ferme ; installation à échelle humaine
- Diversification de la production
- Coût de production plus élevé
- Prime pour vente directe
- Possibilité de transformation des surplus sur place.
4 - Distribution directe :
- Monoculture installation de taille moyenne de 0,5 à 1 ha
- Production pour un marché niche
- Possibilité de négocier les marges
- Concurrence limitée.
5 - Distribution via grossiste :
- Monoculture, plus de 2 ha
- Production pour le marché de masse
- Gros volume et faibles marges.
Le marché potentiel devra se trouver dans un rayon de 100 km et on retrouve environ 800 000 marchés potentiels dans le coin de Québec et 4 099 000 dans la région de Montréal et les environs.
LES SERRES URBAINES
Un type de projet qu’on retrouve pour l’agriculture urbaine c’est le jardin sur un toit (urbainsculteur) dont le Pays-Bas était le pionnier et c’est également l’endroit où on retrouve le plus de serres en date d’aujourd’hui. Le concept d’une serre sur un toit, utilisé surtout pour la préparation des fruits et légumes à consommation directe, est présenté dans la figure ci-bas:
Figure 1 : Concept d’une serre sur un toit
La plus importante ferme urbaine en Europe (1200 m2) se trouve sur le toit d’un bâtiment de 7 étages ce qui a nécessité une ingénierie unique pour la résistance au vent. Elle a été construite en 2016 au Pays-Bas et elle a été utilisée pour la polyculture (tomates, micro-pousses, laitue, aquaculture) mais à cause du coût d’implantation trop élevé la ferme a fait faillite après 2 ans. Un autre facteur néfaste dans cette situation était la proximité de la concurrence de Westland qui produit 80% de la culture en serre au Pays-Bas.
L'installation sur un stationnement (loyer) est un autre type de projet qu’on peut utiliser pour l’agriculture urbaine. Le concept peut cependant avoir certains désavantages comme le mauvais choix pour l’emplacement (aucune synergie avec le bâtiment), l’effet d’ombrage des bâtiments voisins, les matériaux de recouvrement non adaptés ainsi que les coûts d’implantation trop élevés.
Un modèle qui a fonctionné en Amérique du Nord, aux Etats-Unis, est Gotham Greens, débutant avec premier site très petit à Brooklyn (1 394 m2), suivi de 3 autres sites : un autre un peu plus gros à Brooklyn (1 858 m2) suivi de Chicago (6 967m2 - un de plus gros site d’agriculture urbaine en Amérique du Nord) et Queens (5 574 m2). Plus poche de chez nous on retrouve les Fermes Lufa avec leur premier site à Montréal – Ahuntsic, soit une serre de 2880 m2 construite en 2011 au-dessus d’un centre de distribution alimentaire. Grace à leur modèle développé et adapté à la culture urbaine, ils ont réussi à ouvrir un deuxième site à Laval (3 994 m2) en 2013 suivi d’un troisième site à Anjou (12 820 m2) en 2017.
LE CHAUFFAGE ET LE CLIMAT PROPICE
Le chauffage en milieu urbain est essentiellement assuré par le gaz naturel avec une distribution directe, caractérisé ainsi :
- 10,53 kWh/m³ et 1,889 kg de CO2/m³
- faibles coûts d’installation et opération simple
- possibilité de récupération du CO2 pour enrichissement carboné
- technologie à condensation haute efficacité (problématique de poids lorsque on se retrouve sur un toit)
- prévoir le réseau de distribution en conséquence d’un retour froid.
Dans les cas des bâtiments exothermiques, lorsque nous pouvons récupérer une partie de chaleur, la distribution directe se fait en fonction de l’occupant, soit :
- 15-20 BTU/h/pi² (47-63 W/m²)
- faibles coûts d’installation
- couvre de 13-17% des besoins pour la serre (+/-370 W/m²).
Des lois et règlements doivent être respectés soit :
- le code de construction applicable en fonction du zonage ;
- la loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main d'œuvre dans l'industrie de la construction (Loi R-20) ;
- les règlements municipaux ;
- la loi sur la qualité de l’environnement L.Q.E, etc.
LES RECOUVREMENTS DE SERRE
M. Villeneuve continue sa présentation en nous présentant un des éléments le plus important lors d’une construction d’une serre, soir le recouvrement de celle-ci. Il mentionne que le recouvrement de serre le plus utilisé au Québec est le Thermax, fabriqué en LDPE (low density polyéthylène) avec +/-91,3% de transmission/ épaisseur ou en EVA (ethylene vinyl acetate copolymers) avec +/-90% de transmission/ épaisseur. La durée de vie maximale est de +/-4 ans pour une épaisseur de +/-6 à 7,2 millièmes de pouces, ayant une perte de lumière et de capacité mécanique après 3-4 ans.
D’autre projets ont été réalisés avec un autre matériel, le F-Clean fabriqué en ETFE (ethylene -tetrafluoroethylene copolymer) avec +/-94% de transmission de lumière et une durée de vie de plus 25 ans pour une épaisseur de +/-4 millièmes de pouces. Pour ce type de recouvrement on constate une perte de lumière et de capacité mécanique faible dans le temps.
Le recouvrement de serre en milieu urbain le plus utilisé est le plastique rigide double paroi fabriquée en PC (polycarbonate) avec 80% de transmission de lumière pour une épaisseur de 8 mm et une durée de vie de plus 10 ans. Lorsque le recouvrement est fabrique en – Acrylite (Acrylic) il y a 86% de transmission de lumière pour 16 mm et une durée de vie de plus 20-25 ans. Les désavantages d’un recouvrement en plastique sont la perte de lumière et de capacité mécanique dans le temps (acrylique, un peu de jaunissement pour le PC).
Un autre recouvrement de serre, le verre (4mm Glass –LOW IRON), avec 91,3% de transmission et une durée de vie de plus 25 ans avec une épaisseur de +/-4mm. Comme pour les autres recouvrements, on retrouve comme désavantagés la perte de lumière et de capacité mécanique faible dans le temps, lavable.
LES ÉQUIPEMENTS DE LA SERRE
M. Villeneuve mentionne que pour augmenter l’efficacité énergétique, le choix de l’isolation est très important et, les caractéristiques sont généralement :
- Durée de vie de plus 30 ans ;
- Installation plus simple dans les serres neuves ;
- Installation sur pourtour et mur nord ;
- Installation relativement simple ;
- Matériau très efficace +/-R4 par pouce ;
- Augmente la résistance mécanique de la structure ;
- Réduit les bris dans le bas de mur ;
- Réduit les infiltrations d’air ;
- Retour sur l’investissement rapide avec matériaux recyclés ;
- Compatible avec verre double et polycarbonate 16 mm.
L’écran thermique (simple ou double, transparent ou opaque ou bien de type roll-up mural) est aussi important pour l’efficacité énergétique et les caractéristiques sont :
- Durée de vie de plus 20 ans ;
- Installation plus simple dans les serres neuves ;
- Installation sur poutrelle ;
- Ecran double (premier écran transparent) ;
- Réduction de volume d’air à chauffer et réduction de l’effet thermo siphon du ciel noir la nuit (radiation infrarouge) ;
- Élimination possible de la pollution lumineuse ;
- Réduction de la consommation d’énergie de la serre de l’ordre de 25 à 35%.
Le système de contrôle informatique est essentiel dans une serre afin de maintenir le bon climat et obtenir les résultats désirés. Ses caractéristiques sont :
- Durée de vie de plus entre 10 et 15 ans ;
- Conçu pour évoluer et migrer vers de nouvelles versions ;
- Permet de centraliser les opérations ;
- Permet de limiter, voir éliminer les effets croisés ;
- Ajuste le climat en temps réel en considérant la vitesse et la direction du vent, de la pluie, de la lumière ainsi que les besoins de la serre ;
- Peut être programmé pour s’ajuster en fonction des prévisions météorologiques des 7 prochains jours.
Figure 2 : Système de contrôle informatique dans une serre
Des évolutions des systèmes de gestion de l’énergie dans les serres ont permis l’implantations des systèmes innovants, soit :
- Ventilation/déshumidification avec écran thermique fermé ;
- La déshumidification par ouverture de toit sans choc thermique ;
- Migration de l’air humide et chaud ;
- Déshumidification abondante et efficace énergétiquement.
Le système de distribution de chaleur (eau chaude / air chaud) est conçu en modélisant les besoins de chaque compartiment de serre en considérant l’occupation annuelle ou saisonnière, les besoins de fonte de neige, le type de culture sur table, sur gouttière, haute ou basse.
La source de production de chaleur peut être la bouilloire centrale, l’aérotherme individuel ou un système hybride.
Le système de distribution de chaleur peut être horizontal (HAF), vertical (VAF) ou hybride (vertical et horizontal). Une innovation a été implantée au système de distribution/recirculation, soit une chambre de pré-traitement de l’air ainsi qu’un VAF intégré aux écrans thermiques (hybrides avec éclairage artificiel).
Pour ce qui est du système de déshumidification, celui-ci utilise surtout :
- La gestion de l’humidité par déficit de pression de vapeur ce qui est plus près des besoins de la plante mais à cause de la gestion climatique complexe, nécessite une surveillance accrue.
- La ventilation-chauffage qui représente 10 à 15% de la consommation d’énergie d’une serre.
- L’échangeur et recirculation d’air sec déshumidifiés qui produisent des économies d’énergie possibles, une meilleure utilisation du CO2, une conception sur mesure, ainsi qu’une source de froid.
- L’échangeur et la recirculation d’air avec filtre dessiccant menant à des économies d’énergie possibles, une meilleure utilisation du CO2 ainsi qu’une utilisation des équipements existants.
L’éclairage artificiel joue plusieurs rôles dans une serre, soit il contribue au chauffage de la serre ainsi qu’à la photosynthèse. M. Villeneuve profite pour nous rappeler la formule générale de la photosynthèse qui s’exprime ainsi :
6 CO2+ 12 H20 + Énergie de la lumière → C6H12O6+ 6O2+ 6H2O (Campbell,1995).
En termes d’éléments, cela veut dire que le CO2 et le H2O sont absorbés par la plante et transformés, sous l'influence de la lumière, en sucres, amidon et cellulose. Si l’un de ces trois facteurs fait défaut, cela influence négativement la production et/ou la qualité des cultures des plantes.
Dioxyde de carbone+ Eau+ Lumière → Chlorophylle + Matière sèche + Eau+ Oxygène
Alors, comme mentionné auparavant, l’éclairage artificiel contribue au chauffage de la serre, nécessite une installation électrique imposante, un coût d’installation important – 1 000 W /15 m² (1 lampe HPS pour serre haute) ainsi que la possibilité de faire des combinaisons avec des D.E.L (Climate KIC).
Un autre type d’éclairage c’est l’éclairage HPS D.E.L caractérisé ainsi :
- Puissance effective versus puissance installée ;
- Densité d’éclairage et projection de lumière ;
- Couleur (type de lampe, HPS (jaune) ou mercure (favorise le bleu)) ;
- Abordable à l’achat et en coût d’opération ;
- Spectre d’émission prédominant à 589 nm (visible entre 400 et 700 nm), HPS va au-delà du visible dans le 700 à 850 nm = optimale pour croissance, matière fraîche et floraison ;
- Durée de vie jusqu’à 24 000 heures HPS et 100 000 heures D.E.L ;
- Possibilité de faire des combinaisons avec des D.E.L (Climate KIC).
L’industrie de l’éclairage évolue et s’adapte, alors on retrouve maintenant le ballast électronique, une réduction du bruit ainsi qu’une amélioration de l’efficacité d’éclairage de l’ordre de 8 à 10%.
Un autre élément caractérisant une serre est le couvre-sol qui peut être fait du sable, du gravier, du béton, ou bien en membrane (blanche ou noir). Il assure une protection contre les mauvaises herbes, améliore la gestion de l’humidité, peut servir au chauffage (plancher radiant) ou bien à l’irrigation (plancher inondant).
LES TECHNOLOGIES ET LEUR APPLICATION
Les exploitations horticoles peuvent récupérer du CO2 en brûlant les gaz de combustion de leur unité de cogénération ou chaudière. Cette méthode présente toutefois des inconvénients. Pour commencer, il est souvent impossible d’exploiter (complètement) la chaleur produite, ce qui génère du gaspillage et donc une approche peu durable. De plus, les prix de restitution de l’énergie produite par l’unité de cogénération diminuent de plus en plus, ce qui conduit à un manque à gagner. Les caractéristiques du récupérateur de gaz d’échappement sont :
- CO2 à partir de bouilloire au gaz naturel ou propane (combinaison de CO2 et H2O) ;
- Température moyenne de 200°C (dois donc être refroidi) ;
- Peut-être mélangé à l’air ambiant = 30°C, mais beaucoup d’eau ;
- Idéale est la condensation = 40°C et 70% moins d’eau ;
- Technologie applicable aux serres à l’eau chaude ;
- Dois idéalement être couplé à une réserve thermique – (récupération de chaleur de l’ordre de 10%) ;
- L’installation doit être certifiée par un inspecteur CSA – (modification de la cheminée) ;
- Coût d’installation accessible ;
- Permet la récupération du CO2 ;
- Permet une injection déshumidifiée.
Utilisation du CO2 liquide est une autre technologie utilisée dans les serres pour assurer le processus de croissance des plantes. Lors des journées très lumineuses – surtout entre avril et septembre - les plantes absorbent très rapidement le CO2 présent dans la serre. Cela peut entraîner des pénuries du niveau de CO2 qui ont un effet négatif sur la qualité et la croissance des plantes.
Le dosage avec du CO2 pur liquide compense cet effet en enrichissant automatiquement l’atmosphère de la serre en CO2 au moment souhaité. Ainsi, la concentration correcte en CO2 est garantie en permanence, ce qui accroît la récolte des plantes cultivées.
En résumant :
- Utilisation du CO2 pur de grade alimentaire ;
- Technologie applicable aux serres de toute dimension ;
- Utilisation simple et efficace ;
- Aucune récupération d’énergie ;
- Coût d’installation accessible ;
- Permet une injection déshumidifiée ;
- Le CO2 doit être vaporisé pour être injecté ;
- Coût du CO2 liquide élevé (proportionnel au volume négocié).
CONCLUSION
M. Villeneuve conclut que chaque entreprise est unique avec des projets faits sur mesure pour la serre urbaine. Alors il est très important de faire une évaluation du marché et cibler des endroits propices pour implanter une serre, comme les développements urbains (toit condo, logement social, etc.), les toits des cafés/terrasse (soleil en hiver) ou bien les toits des grandes entreprises (aliments pour la cafétéria). Coté énergétique, il sera intéressant d’identifier des entreprises avec une perte de chaleur importante qui sera bénéfique pour le projet afin de créer une synergie.
Par Magdalena Stanescu, Comité édition
Consultez la présentation de la conférence technique
Conférence principale
Réseaux urbains d'énergie: une inspiration pour une ville dense, durable, juste et résiliente
Présentée par M. Daniel Pearl, Architecte associé, Cofondateur L'OEUF, Professeur agrégé, École d’architecture de l'Université de Montréal
Gauche à droite : M. Daniel Pearl accompagné de M. Étienne Séguin-Dupuis
La conférence principale du 4 novembre dernier portait sur l’architecture durable. M. Pearl a tenté de répondre à des questions comme « Quelles sont les perspectives de la ville moderne en période d’épuisement des ressources et de changements climatiques mondiaux ? », ou encore : « Comment trouver, pour une ville, un équilibre idéal entre son empreinte écologique et sa capacité d’accueil ? ». Une conférence fort intéressante durant laquelle M. Pearl nous a invité à réfléchir et à aller au-delà des idées préconçues en matière d’environnement bâti.
INTRODUCTION
M. Pearl débute en expliquant que nous vivons dans un monde où les responsabilités financière, sociale, environnementale et culturelle sont fractionnées en silos bureaucratiques et où la finance favorise une privatisation du bien commun. Il présente des exemples d’aménagements urbains dans la ville d’Oslo qui compte quelques 650 000 personnes. On y compte un réseau de transport en commun très développé des rues réservées aux cyclistes et beaucoup d’espaces piétons, mais il y a peu de logements abordables et conséquemment pas de mixité ce qui serait souhaitable selon M. Pearl. Selon lui, il faut des projets qui conjuguent une réduction de l’empreinte écologique et une bonne capacité d’accueil des Villes. Plus précisément, on doit se demander quelle est la densité adéquate pour une ville, c’est-à-dire comportant suffisamment d’espaces verts tout en étant de densité suffisante afin de maximiser la capacité d’occupation et réduire l’empreinte écologique de manière globale.
M. Pearl présente un graphique (image no 1) qui résume le cadre de développement des quartiers durables. Il explique que l’approche doit être axée sur le processus et non pas seulement le « quoi » ou le résultat à proprement parler.
Figure 1 : Cadre de développement d’un quartier durable
Cette approche doit également être transdisciplinaire afin de permettre les synergies entre la planification urbaine, l’ingénierie et l’architecture. La notion de partage est intrinsèque à l’implantation de réseaux urbains (réseaux de chaleur/refroidissement communs) tel qu’illustré à figure 2.
Figure 2 : Mise en place d’un réseau urbain
M. Pearl poursuit en nous présentant des réseaux dits de 4e et 5e génération (réseaux à très basse température utilisant des pompes à chaleur). Ces réseaux ne peuvent être viables que dans des quartiers suffisamment denses, et présentant une mixité des usages qui favorise le partage de chaleur. Encore une fois, M. Pearl insiste, leur conception nécessite une interdisciplinarité, car le travail en silo des professionnels ne serait pas viable. Par ailleurs, un travail politique est aussi nécessaire afin d’examiner la planification urbaine, l’aménagement du territoire et la réglementation. M. Pearl nous donne l’exemple du projet False Creek à Vancouver en Colombie-Britannique pour lequel les riverains ont l’obligation de se connecter au réseau urbaina.
Figure 3 : Schéma de principe d’un réseau urbain
Puis, M. Pearl présente l’approche écosystémique urbaine qui compte 4 principes : la compacité, la complexité, l’efficacité et la stabilité (image 4). Tous sont nécessaires au développement d’une ville dite durable.
Figure 4 : Villes durables : 4 principes essentiels
Il poursuit en expliquant que le développement des villes basé sur l’étalement et l’augmentation de l’utilisation des ressources n’est pas soutenable. M. Pearl introduit donc le principe d’efficacité urbaine.
Par ailleurs, les villes modernes doivent être attractives et agréables. Pour M. Pearl, le changement sera amené par le plaisir des habitants. Cela peut se faire en augmentant les espaces verts, en redonnant des espaces publiques à la communauté et en intégrant des centres de commerce local. Pour ce dernier point, M. Pearl donne l’exemple d’un « souk » où il y aurait une mixité de services accessibles aux gens, par exemple au rez-de-chaussée d’un édifice à bureau ou d’une tour d’habitation.
M. Pearl poursuit en présentant le projet de recherche du « secteur Bridge-Bonaventure » d’une superficie de 2,3 km2. Ce secteur comporte plusieurs défis : les espaces publics sont manquants, le site est fortement industriel et physiquement enclavé, c’est un désert alimentaire, la biodiversité est quasi-absente et certains terrains sont contaminés. Par ailleurs, ce site offres plusieurs opportunités de développement avec ses nombreux espaces vacants favorisant la restructuration, un patrimoine bâti et une proximité avec le centre-ville de Montréal pour ne nommer que ceux-là. M. Pearl nous présente ensuite les quatre principes directeurs élaborés par les chercheurs et qui constituent une vision commune pensée pour ce secteur et apte à inspirer son avenir. Ils sont :
- La cohabitation des industries et la mixité des usages
- La création d’espaces publics et la pédagogie du patrimoine
- La mobilité et l’accessibilité par le désenclavement et la sécurité des piétons et cyclistes
- L’innovation sur plusieurs plans (co-conception, écoquartier, réseau urbain d’énergie, gestion des eaux de pluies et des déchets, économie circulaire)
Ensuite, M. Pearl présente un projet de quartier durable espagnol : les « super-îlots » employés pour revitaliser un quartier de Barcelone, réduire la pollution de l’air et les îlots de chaleur (image 5). Il pense que ce principe est applicable au quartier Bridge-Bonaventure et faciliterait la cohabitation de nouveaux usages mixtes avec les industries déjà présentes, tout en considérant la mobilité et le transport.
Figure 5 : Principe du super-îlot, une cellule carrée de 400 m de côté dans laquelle les piétons sont prioritaires vis-à-vis des véhicules qui eux circulent en périphérie
M. Pearl précise que la ville concentrique comme on la connait doit se transformer pour devenir une ville à distance de marche et un modèle polynucléaire avec des milieux de vie complets et complexes à l’échelle humaine. Par ailleurs, M. Pearl explique comment le concept d’économie circulaire pourrait être intégré au site, notamment en ce qui a trait à la gestion des eaux pluviales et des déchets.
Par la suite, M. Pearl présente « Demain Montréal », le lauréat du concours de Réinventer Montréal, un projet qui permettra de transformer le site de l’ancienne cour de voirie De la Commune. Un projet « catalyseur » mis de l’avant par la Ville de Montréal qui, depuis 2016, fait partie de C40, un réseau de villes engagées à lutter contre les changements climatiques à travers le monde.
Conclusion
Pour conclure, sa présentation, M. Pearl insiste sur le pouvoir du processus. Le cheminement commun et l’apprentissage des intervenants est important, car il faut un impact massif en impliquant tout le monde.
Par Mariline Fréchette, Comité édition
Consultez la présentation de la conférence technique
ÉQUIPE ÉNERGIR
Merci à nos collaborateurs d'Énergir (entourés de M. Francis Lacharité, président du Chapitre) de se joindre à nous pour le souper-conférence de novembre 2019.
NOUVEAUX MEMBRES D’ASHRAE
Nous souhaitons la bienvenue aux personnes suivantes qui sont des nouveaux membres ASHRAE :
- M. Pascal Michaud
- M. Nezihi Ozdemir
- M. Marc Salameh
- M. Jerome Chandonnay
- M. Rodrigo Cerqueira
- M. Francois Tardyx
VOICI UN APERÇU DES DIFFÉRENTS PRÉSENTOIRS DE NOTRE DERNIÈRE SOIRÉE
ÉNERGIR
Dimitri Jeanty (invité), Daniel Côté et Mathieu Rondeau
ENERTRAK
Anthony Palucci, Ronald Gagnon (invité), Nazanin Moradi, Rabih Al-Malouf, Olivier Racette et Marc Naccache
ENGINEERED AIR
-
Rob Boicey, John Deuel, Fooad Zarrin Nejad (invité), Charles Noreau, Sylvain Durocher et Mathew Abouaccar
MIURA CANADA LTÉE
-
Martin Zambaka