Par Mariline Fréchette et Adam Fecteau, comité édition
9 mai 2016
Conférence technique
Le Pavillon Anne-Marie Edwards du Collège John Abbott par Nicolas Lemire, ing. M.Sc.A., PA LEED BD+C, ASHRAE HFDP, président de Pageau Morel
Lors du dernier souper-conférence de la saison 2015-2016, nous avons eu le plaisir d’accueillir M. Nicolas Lemire qui est venu nous parler d’un projet d’exception ayant remporté de nombreux prix, dont la première place au ASHRAE Technology Awards, soit la création d’un nouveau pavillon des sciences au Collège John Abbott développé grâce à un processus de conception intégrée.
Un site historique d’une grande beauté
Lors de la réalisation de ce projet, l’équipe de conception formée d’ingénieurs et d’architectes a dû composer avec les particularités inhérentes au site d’implantation situé au bord de l’eau à Ste-Anne-de-Bellevue. D’abord, il y avait le fait que le campus du collège partage un terrain et certains services avec le campus McDonald de l’université McGill. Ainsi, il fallait créer un bâtiment d’une superficie suffisante pour répondre aux besoins grandissants du collège, tout en s’assurant de préserver l’intégrité de certains espaces verts pour les usagers, assurer le flux des personnes entre les bâtiments et mettre en valeur la beauté du site, notamment en donnant accès à de beaux points de vue sur l’eau et sur l’île de Montréal.
Ensuite, il fallait composer avec le fait que le campus est constitué de bâtiments anciens avec une architecture typée, notamment les murs de briques rouges et les toits de terra cotta. Il était essentiel que le nouveau pavillon des sciences, que l’on voulait moderne, s’intègre harmonieusement avec l’architecture en place. Ce défi a été relevé grâce à l’intégration de l’acier et du verre comme matériaux de revêtement extérieur et en jouant sur la transparence et la réflexion du vitrage.
Finalement, il fallait préserver les arbres matures, dont un ginkgo biloba centenaire situé en plein milieu du site choisi. Les architectes ont donc modifié la forme du bâtiment et ont utilisé l’arbre comme symbole architectural pour leur design. Le résultat est un édifice « en forme de bâton de hockey », soit 2 ailes allongées et en angle reliées au centre par un atrium (voir image 1).
Les objectifs du projet
La première étape a été de déterminer les objectifs et les valeurs du collège et de ses mécènes pour l’implantation du nouveau pavillon. Ainsi, les critères de développement étaient par ordre de priorité :
- Garantir un environnement intérieur confortable obtenu en favorisant la ventilation et l’éclairage naturels et en choisissant des matériaux sains;
- Utiliser le bâtiment comme véhicule d’apprentissage en ce qui a trait au développement durable;
- Maximiser l’efficacité énergétique du bâtiment;
- Donner l’exemple en ce qui a trait à la gestion de l’eau;
- Rencontrer la certification LEED, et si possible atteindre le niveau Or.
La vocation de l’édifice
Bien qu’il s’agisse d’un pavillon des sciences, la vocation de l’édifice est multiple. Il regroupe plusieurs départements dont entre autres, la chimie, la biologie, la physique, ainsi que des programmes techniques comme le biopharmaceutique, les sciences infirmières et le programme ambulancier. Le nouveau pavillon devait donc offrir différents types de locaux comme des classes, des laboratoires, centres d’apprentissage, bureaux pour le personnel enseignant et des aires de circulation pour répondre à des besoins différents.
Les mesures d’efficacité énergétiques retenues
M. Lemire a introduit la question en soulignant que l’ingénierie du bâtiment est essentielle pour réduire notre consommation d’énergie, car en Amérique du Nord, 40% de l’énergie totale utilisée est reliée aux bâtiments. De plus, dans une ville comme Montréal, où la plupart des bâtiments datent des années ’60 et ’70, et donc construits avec les standards de l’époque, le potentiel de réduction est non négligeable.
Voici les stratégies de design choisies pour le pavillon Anne-Marie Edwards :
- Optimisation de l’enveloppe, dont un vitrage à basse émissivité;
- Éclairage naturel;
- Ventilation naturelle et mécanique;
- Récupération de chaleur sur 100% de l’évacuation;
- Collection et récupération d’eau de pluie (économie d’eau de 60%);
- Chauffage de l’eau chaude domestique par l’énergie solaire;
- Géothermie (51 puits) combinée à un refroidisseur et une chaudière d’appoint pour les pointes en été et en hiver;
- Chauffage et refroidissement radiants;
- Contrôles du bâtiment centralisés avec détection de présence.
Voici également quelques-unes des solutions mises de l’avant :
- Regrouper les laboratoires de tous les programmes dans une même aile afin de faciliter la gestion des contaminants;
- Alimenter les classes, les bureaux et les locaux du centre d’apprentissage avec 100% d’air neuf et réduire cette proportion entre 60 à 70% d’air neuf pour les laboratoires en utilisant le retour des autres zones. Compléter la récupération d’énergie grâce à un échangeur au glycol;
- Intégrer la ventilation naturelle grâce à l’effet cheminée généré dans l’espace de l’atrium. L’air neuf est acheminée par des fenêtres ouvrantes motorisées localisées aux extrémités des 2 ailes et circule dans les corridors pour alimenter les pièces, et termine sa course dans l’atrium où elle est entrainée vers le haut jusqu’à la sortie (voir image 2);
- Récupérer l’eau de pluie et la traiter pour alimenter les cabinets d’aisance;
- Utiliser un chauffe-eau solaire pour le préchauffage de l’eau domestique;
- Maximiser les économies d’énergie par l’utilisation d’un système de contrôle de bâtiment centralisé. Par exemple, le contrôle de l’éclairage et de la demande de chauffage ou de climatisation se font par détection de présence et en fonction de valeurs mesurées par des sondes et capteurs.
En terminant, nous tenons à féliciter M. Lemire et son équipe pour les nombreux prix et distinctions que ce projet a remportés:
prix et distinctions :
- Prix du mérite du Canadian Architect (2009)
- Grand Prix du génie-conseil 2013 | Catégorie Bâtiment Structure
- 1er Prix Contech pour Processus de conception intégrée
- Prix Énergia de l’ Association québécoise pour la maîtrise de l’énergie
- (AQME) | Catégorie Bâtiment neuf – Tous Secteurs (2014)
- Prix d’excellence en architecture 2015 de l’Ordre des architectes du
- Québec | Catégorie Bâtiments institutionnels publics
- 1er Prix International ASHRAE Technology award | Catégorie
- Bâtiment institutionnel (2016)
- Certification LEED Or (juin 2015)
Équipe de projet :
Propriétaire : John-Abbott College
Architecture: Saucier + Perrotte Architectes
Consultant Structure/Civil : SDK
Consultant Mécanique/Électricité : Pageau Morel
Consultant EED : Martin Roy et ass.
Gestionnaire de projet : SNC - Lavalin
Code : Technorm inc.
Entrepreneur : EBC inc.
Conférence principale
« Natural Ventilation », par Frank Mills, Chartered Engineer, FCIBSE, MIMechE, MASHRAE, MIE, Directeur technique Low Carbon Design Consultants, Royaume-Uni
Après M. Lemire, M. Frank Mills est venu nous instruire sur une la méthode à l’origine de la ventilation mécanique d’aujourd’hui, c’est-à-dire, la ventilation naturelle. M. Mills est ingénieur chez Low Carbon Design Consultants et sommité mondiale en ventilation naturelle.
M. Mills a débuté en faisant un retour sur l’histoire de la ventilation telle qu’on la connait aujourd’hui et ses racines dans la ventilation naturelle. Il ramène par la suite la ventilation naturelle dans un contexte d’aujourd’hui en présentant les différents systèmes, stratégies et outils associés à la ventilation naturelle.
Avant l’avènement de la ventilation mécanique telle que nous la connaissons aujourd’hui, les architectes utilisaient la ventilation naturelle afin de chauffer et refroidir leurs édifices. Ils incorporaient les éléments de ventilation à même l’enveloppe du bâtiment. Les bâtiments de style victorien en sont de parfait exemples, tel que le Head of Steam Pub à Liverpool. Sur les photos 1 et 2, on distingue clairement les registres de ventilation naturelle incorporés à même la structure du bâtiment.
Photo 1 : Registre extérieur
Photo 2 : Registre intérieur
M. Robert Boyle, père de la célèbre formule de Boyle P1V1=P2V2, a également conçu un système d’ouverture et de cheminé qui, combiné à sa découverte par rapport à la densité des gaz, servait à ventiler les bâtiments à l’aide de la ventilation naturelle. La Photo 3 présente une publicité du système de M. Boyle.
Photo 3 : Publicité du système Boyle.
Bien que les systèmes de ventilation naturelle aient évolués depuis l’époque de Mr. Boyle, le principe de base demeure le même. La ventilation naturelle repose sur le principe de Boyle où l’air chaud (et vicié) a une densité inférieure à l’air froid (et frais). L’air chaud est ainsi évacué par de hautes cheminées et remplacé par de l’air frais à l’aide de registres au niveau du sol ou de chaque étage. C’est pour cette raison que les bâtiments ventilés naturellement requièrent beaucoup de hauteur.
Les systèmes d’aujourd’hui bénéficient d’une panoplie d’accessoires à la fois pratiques et esthétiques. La photo 4 montre des exemples d’accessoires utilisés dans les systèmes modernes.
Les systèmes modernes sont également très technologiques et bénéficient des derniers avancements en ce qui a trait à l’immotique. Par exemple, on trouve aujourd’hui des fenêtres motorisées capables de communiquer avec un système de gestion de l’énergie qui régit l’ouverture des fenêtres
Photo 4 : Accessoires modernes de ventilation naturelle.
De plus, aujourd’hui les avancées en informatique et calculs numériques font en sorte qu’il est maintenant possible de prédire avec précision les comportements des systèmes de ventilation naturelle. Ces modélisations numériques, jumelées à des designs intégrés, permettent d’optimiser le bâtiment dans son ensemble et ainsi minimiser l’énergie nécessaire à son fonctionnement de façon significative.
M. Mills a conclu sa présentation en posant une question : Et si la ventilation mécanique n’était pas une option? En Amérique du Nord et dans les sociétés occidentales en générale, la disponibilité de l’énergie n’est pas un problème, mais ce n’est pas toujours le cas dans les pays en développement. Effectivement, M. Mills nous a donné l’exemple d’un hôpital au Rwanda où la ventilation mécanique n’était tout simplement pas viable. Toutefois, l’équipe de conception a réussi à développer un hôpital ventilé de façon naturelle à 100 % et où les patients sont confortables et se sentent en sécurité. En définitive, le parcours inspirant de M. Mills nous a permis d’apprécier le potentiel de la ventilation naturelle moderne.
Photo 5 : Hôpital de Butaro, Rwanda
Voici un aperçu des différents présentoirs de notre dernière soirée
Enertrak
Endem Kogil, Steven Micheli, Rime Mansour, Marc Naccache et Vincent Dubreuil-Hubert
Contech
Alain Picard et Natacha Milot
Ecogenia
Daniel Lalonde et Sonia Pournazari
Enviroair
Jeff Clarke et Anthony Jonkov